Le « Kâlachakra »
document secret au sein du Kiu-Té

Lorsqu’en 1959, le Tibet fut pris par les communistes chinois, cent mille réfugiés fuirent le pays, emportant avec eux leurs possessions les plus précieuses. Parmi celles-ci se trouvaient les textes du Kâlachakra, incluant de nombreuses interprétations effectuées au Tibet durant les millénaires de son isolement. Cet Enseignement Secret originel, appelé Kalachakra, ainsi qu’un supplément, tout aussi secret que le document précédent, étaient inclus dans le Kiu-Té et bien connus des Instructeurs de H.P. Blavatsky. Celle-ci eut donc elle-même connaissance de ce contenu.
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  I – Origines du Kâlachakra Dans « La Doctrine secrète », Mme Blavatsky avait elle-même insisté sur l’importance de ce texte, le Kâlachakra, qu’elle définissait comme « le plus important ouvrage dans la division Gyut [rGyud ] du Kanjour, la division de la Connaissance mystique »[1]. Notons le fait remarquable que Mme Blavatsky connaissait parfaitement le livre de Kiu-Té sous son nom le mieux approché phonétiquement et que la corrélation entre le rGyud et le « Kiu-te » était pour elle évidente ; preuve, s’il en était besoin, que le mépris et la négation qui ont entouré son œuvre procèdent d’une totale mauvaise foi et d’une complète ignorance de son contenu. Le Tibétologue David Reigle retrace de manière très suggestive l’histoire de cette division du Kiu-Té. Et cette histoire fait apparaître sous un jour nouveau l’origine des Enseignements révélés par H.P. Blavatsky :
  • Le Bouddha Gautama donna un Enseignement Secret au Roi de Shambhala, Suchandra.
  • Suchandra retourna dans son royaume et rédigea cet Enseignement en 12000 vers qui porta le nom de « Mûla Kâlachakra Tantra ». Il fut donc conservé à Shambhala pendant de nombreux siècles, inconnus du reste du monde.
  • Le Législateur Mänjusrîkîrti[2], le premier d’une lignée de 25 Législateurs[3], fit un résumé (car l’original en 12000 vers était devenu trop difficile à comprendre, même pour les habitants de Shambhala) de cet Enseignement Secret.
  • Législateur Pundarîka, successeur du précédent, écrivit à son sujet un vaste Commentaire appelé Vimalaprabhâ.
  •  Au Xe siècle de notre ère, un Pandit indien voyagea vers Shambhala et ramena en Inde le résumé du Kâlachakra Tantra, composé en 1047 vers, ainsi que son commentaire, le Vimalaprabhâ. Ceux-ci étaient écrits en Sanskrit puisque tel est le langage de Shambhala.
  • Au XIe siècle de notre ère, ces deux documents (Kâlachakra Tantra  et Vimalaprabhâ) furent amenés de l’Inde au Tibet et traduits dans la langue tibétaine. Maintenant ces traductions existent respectivement dans le Kanjour et le Tanjour tandis que des copies des originaux sanskrits ont été préservés au Népal.
  • Au Tibet, du Kâlachakra furent préservés pendant un millier d’années jusqu’à ce que survint la dévastation opérée par la l’invasion chinoise de 1959.
Kala Mandala

Tanka du Kâlachakra Tantra

II – Supplément secret donné au Kâlachakra De nombreuses « interprétations » du Kalachakra furent faites au cours des siècles. Suivons cette élaboration et cette transmission :
  • Un érudit tibétain, Budon (XIIIe siècle de notre ère) et son contemporain Dolpopa, firent respectivement des compilations et des commentaires sur les documents ((Kâlachakra Tantra  et Vimalaprabhâ).
  • Dolpopa fonda une École, appelée « Jonangpa » , liée au Bouddhisme tibétain, qui fut officiellement proscrite au XVIIe siècle  en raison de ses doctrines considérées comme hérétiques au regard du Bouddhisme « exotérique » officiel .
  • Târanâtha, un philosophe lié à cette École Jonangpa du XVIe siècle laissa quelques travaux sur le Kâlachakra qui sont d’une importance particulière car ils nous informent de la nature des « interprétations » du Kâlachakra que possédaient cette École. Nous apprenons ainsi que l’École Jonangpa étudiait  avant tout les Enseignements du Kâlachakra et du Tathâgatagharba. (Tathâgata-gharba = matrice des Tathâgata ; Tathâgata = Dhyani-Bouddha ou Dhyan-Chohan »). Le terme Tathâgata se trouve dans les textes sanskrit bouddhistes, Dhyani Bouddha est un équivalent forgé par les auteurs bouddhistes modernes, et Dhyan-Chohan est un équivalent utilisé dans les écrits théosophiques.
Le Tibétologue, David Reigle précise :
« Il est remarquable  que cet Enseignement (celui du Tâthâgatagarbha) tel qu’il est interprété par eux (les affidés de l’École Jonangpa), est en harmonie avec « La Doctrine secrète », et  constitue également ce en quoi « La Doctrine Secrète » diffère du Bouddhisme orthodoxe ».
Cette dernière remarque est extrêmement importante : en effet, c’est en raison des divergences constatées entre certains axiomes de la Théosophie et ce qui était accessible aux orientalistes, à l’époque de Mme Blavatsky, que le discrédit a été jeté sur l’authenticité de sa Doctrine. Remarquons que Târanâtha affirme qu’immédiatement après leur introduction en Inde – en provenance de Shambhala – le Kiu-Te et ses Commentaires furent transmis secrètement de manière ininterrompue de Maître à Disciple « pendant près de 300 ans ». Ceci confirmerait le caractère profondément occulte des commentaires oraux dont les Instructeurs de Mme Blavatsky font si grand cas tout en soulignant le lien de leur Enseignement avec celui de la secte préservatrice, Jonangpa.
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III – Transmission du supplément secret du Kalachakra au Panchèn Lama et aux Maîtres de Madame Blavatsky

Suivons encore le cheminement de ces textes secrets :
  • Le Grand réformateur du Bouddhisme Tibétain, Tsong-kha-pa (1357-1419) reçut la Tradition du Kâlachakra via les deux instructeurs qui précèdent,( Budon et Dol-po-pa).
  • Kedrupjé, disciple de Tsong-kha-pa, prépara une grande « interprétation » du Kâlachakra en 4 volumes, à côté de  plusieurs ouvrages plus courts sur le sujet. Kedrupje est considéré comme une des premières Incarnations des Panchen Lama.
  • La lignée des Panchèn Lama a donc continué la transmission de cette Tradition du Kâlachakra. Elle en est la protectrice particulière du Kâlachakraet son monastère, Tashi-lhunpo, a été le centre majeur des études sur le Kâlachakra au Tibet. Le Ier Panchèn Lama, (1569-1662) écrivit un commentaire secondaire sur le  Vimalaprabhâ d’après les travaux de Kedrupjé et fonda le Collège tantrique de Tashi Lhunpo.[4]
  • Le IIIe Panchèn Lama fonda le Collège du Kâlachakra à Tashi lhunpo dont le nombre des étudiants est limité à vingt-cinq.
  • Le Rituel du Kâlachakra fut obtenu auprès du Collège du Kâlachakra de Tashi-lhunpo par le VIIIe Dalaï Lama (Jamdpal Gyasto,1758-1805) lorsqu’il le visita qui le transmit à au Collège Nomgyal Dotsaang, une École tantrique privée du Dalaï Lama qui reçoit 16 étudiants adonnés au Kâlachakra.
Toutes ces données nous ramènent, de façon très précise, aux allégations de Mme Blavatsky concernant les Sources de « La Doctrine Secrète ». David Reigle met un terme à sa démonstration en abordant la dernière énigme qui subsiste : l’identification des Stances de Dzyan, fondements de La Doctrine secrète[5]. Cet Universitaire déclare :
«  Depuis l’identification évidente des Livres de Kiu Te (rGyud-sde) comme étant les Tantra bouddhistes tibétains, en 1981, je me suis longtemps douté que le « Livre de Dzyan », duquel les Stances de « La Doctrine Secrète » étaient traduites, pouvaient être le Mûla (Racine) Kâlachakra Tantra perdu.  »
Il énumère cinq raisons qui fondent cette découverte et réhabilitent les allégations de Madame Blavatsky :
  1. Le texte abrégé qui subsiste du Kâlachakra est toujours placé en tête des textes du Kanjour ; pareillement, Madame Blavatsky  situe le « Livre de Dzyan » comme le « Premier des 14 volumes de Commentaires » du Kiu-Té.
  2. La localisation du plus grand centre d’étude du Kâlachakra était le monastère de Tashi lhunpo, adjacent à la résidence des Maîtres de Mme Blavatsky, à Shigatsé (Tibet).
  3. La référence à Shambhala est constante, dans la littérature théosophique, comme source de ses Enseignements ; elle est pareillement la référence du texte du Kâlachakra.
  4. Seul, le Kâlachakra, parmi les livres de Kiu-Té, accorde à la Cosmogenèse et à l’Anthropogenèse une place centrale. C’est également le cas de « Stances de Dzyan » dont « La Doctrine secrète » est un commentaire.
  5. Le terme « Dzyan » est une transcription phonétique tibétaine du sanskrit « Jnâna » qui signifie « la Connaissance-Sagesse ». Or, « Jnâna » est également le titre de la cinquième et dernière section du Kâlâchakra.
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[1] « La Doctrine Secrète », vol. VI, p. 82. [2] Jam-dpal Grags-pa en tibétain. [3] Kalkis en sanskrit et Rigden ou Rigs-ldan en tibétain. [4] Le IIIe Panchèn Lama (1737-1780) écrivit le plus fameux des « Guides vers Shambhala ». Son guide semble être fondé sur celui du Tanjour, (le Kalâpâvatârâ), traduit par Târanâtha à partir d’un original sanskrit maintenant perdu. Le nom de Shambhala a donc toujours été relié à « la Sagesse sans Âge. » [5] (D. Reigle, « Light on the Dzyan : Kalachakra », Symposium on H.P.Blavatsky’s Secret Doctrine, Proceedings Sat. & Sun. Juillet, 21-22, 1984, Wizard Bookshelf, San Diego, California. )

Définition de l’expression « Doctrine Secrète »

Synonyme de « Doctrine Hermétique », de « Doctrine Ésotérique » et, dans leur sens authentique, de « Sciences Occultes ».

Cette expression a été attribuée dans l’Antiquité à l’ensemble des Enseignements ésotériques relatifs à la formation de l’Univers, à la structure et à la place de tous les êtres — notamment de l’homme au sein de ce dernier. Ces Enseignements furent délivrés sous le nom de « Doctrine Ésotérique », « Doctrine Hermétique » ou « Doctrine Secrète » afin de distinguer celle-ci du courant transitoire des différentes écoles de pensées philosophiques ou scientifiques prévalant dans le monde et qui se s’attachaient pas — ou ne s’attachent pas — directement ou indirectement à elle.
Cette Doctrine est, quant à sa forme et à ses procédés de divulgation, aussi variable que l’Histoire des hommes mais quant à son fond, puisqu’elle enseigne les Lois Éternelles, elle est de la pérennité de l’Univers. C’est pourquoi les anciens Égyptiens l’appelèrent « la Doctrine du Ciel étoilé ». Cet Enseignement était commun à tous les peuples issus de l’Atlantide et transmis en Inde d’où il rayonna sur tout l’Orient, en Chaldée, en Égypte et de l’Égypte en Grèce. Il véhiculait une Connaissance certaine et salvatrice car en elle gisaient — et gisent encore — les remèdes aux maux liés à la condition humaine :
  • le mystère de la vie et de la mort ;
  • la souffrance tant physique (maladie, torture) que morale ;
  • la misère et le manque permanent ou renouvelé ;
  • la dure nécessité d’un labeur pénible pour se procurer nourriture, toit et vêtement sur un environnement naturel qui reste à être maîtrisé par l’homme…
Toutes les grandes Religions se sont attelées à un encouragement de l’être humain pour que celui-ci puisse se libérer de sa condition terrestre ; qu’elles aient appelé ce cheminement « Rédemption », « Libération », « Remontée », etc. elles se référaient à un état où les malheurs qui prévalent ici-bas, soumis à l‘impermanence de toute chose, étaient dépassés, vaincus. Les Religions monothéistes ont insisté sur la notion de « chute » de l’âme humaine dans des conditions d’existence par trop denses (la matière qui structure notre monde terrestre) mais la Philosophie du Bouddha nous rappelle aussi cette même et triste réalité, nous demandant de sortir de la « ronde des renaissances » (réincarnations) et de mettre fin ainsi à la souffrance. Toutefois, les Religions n’ont jamais révélé à l’Humanité cette Connaissance exhaustive de l’Univers et de l’être humain ainsi que des moyens devant être mis en œuvre pour accéder à cette Libération. Ces moyens constituent ce qui est appelé en Occident la Théurgie ou Magie Divine (en Orient, il s’agit du Tantrisme de la Main Droite). Bien mieux, quand quelques éléments de leur caste sacerdotale respective (prêtres, brahamanes, popes, etc..) eurent vent de cette Connaissance, ils firent tout pour l’occulter, la maudissant officiellement afin qu’aucune de leur ouailles — sur lesquelles ils voulaient détenir un pouvoir mental et moral absolu — ne leur échappât. Nous devons déceler dans ces lignes aussi bien tous les efforts que la caste des brahmanes en Inde fit pour altérer les textes (et mieux piller, de la sorte, les veuves riches en les faisant brûler) que les exactions commises par les premiers « Pères » du christianisme qui s’acharnèrent à altérer sinon à détruire cet Enseignement Ancien. Cette destruction substitua au « Connais-toi toi-même et tu connaîtras l’Univers et les Dieux », la devise qui allait gouverner les esprits jusqu’aux premiers pas de la Science Moderne : « Crois, sans chercher à savoir ». Étaient ainsi évitées des investigations très dérangeantes sur l’origine non seulement de certains dogmes du Christianisme (ou de textes sacrés de l’Hindouisme) mais aussi des Sacrements et du Cérémonial Théurgique de ce dernier. Cette Connaissance exhaustive, donc, est le contenu de ce qui est appelé « La Tradition  Ésotérique » ou « la Tradition Hermétique » ou encore « La Tradition Primordiale ». Aussi est-ce à juste titre qu’Helena Pétrovna Blavatsky nomma son monumental ouvrage « La Doctrine Secrète ».